Soulèvements
Soulèvements. Ils nous démangent à mesure qu’on fixe ces images: comme celle de ces douze insurgés fusillés pendant la Commune et dont les corps inertes, rangés dans des cercueils, s’enchaînent pareils à des lignes de plomb dans des casses d’imprimerie.

Soulèvements. Action de lever quelque chose de lourd ; se soulever aussi ; une action collective aux ressorts généralement individuels, prise en proportion de ce qui oppresse, écrase, contraint, comprime. Se dresser, dresser le poing, tenir debout, résister contre la lourdeur des temps d’hier « Dada soulève tout » et d’aujourd’hui : « Nuit Debout ».
Philosophe et historien de l’art, Georges Didi-Huberman, décline dans cette exposition – et le catalogue qui en fait écho – les différentes formes que peuvent endosser les soulèvements à l’échelle du visible. Bouches ouvertes, bras tendus… De ces mille façons « d’encorporer » la colère, Didi-Huberman en dresse quelques typologies selon que les images et les personnages dont elles témoignent s’expriment par gestes, mots, paroles, désirs…

Division bien artificielle pour qui manifeste au pied levé et au pied du mur son courroux. Pour autant se dégage au fil des 250 images (dessins, photographies, peintures, films …) une gestuelle de l’émeutier dont les équations corporelles – jambes instables, poings levés, corps en déséquilibre… – sont autant de figures esthétiques soulevées par ces pulsions vitales soufflées à l’ordre établi.
Novembre 2016, Philippe Pataud Célérier
Voir Le Monde Diplomatique, décembre 2016.
Soulèvements, Georges Didi-Huberman, Jeu de Paume 18 octobre-15 janvier 2017 ; Gallimard/Jeu de Paume, 420 pages, 49 euros.